En marge de la COP30, une favela de Belem étouffe
Devant l'entrée de sa maison délabrée, une petite fille se rafraîchit avec sa mère dans une grande bassine remplie d'eau. La chaleur humide est étouffante dans cette favela de Belem, ville d'Amazonie brésilienne qui accueille la COP30.
Non loin de là, Rosineide Santos, manucure de 56 ans, estime que "le climat a beaucoup changé" depuis son arrivée il y a une vingtaine d'années à Vila da Barca, quartier pauvre bâti sur des pilotis qui surmontent une eau saumâtre et charriant des monceaux d'ordures.
"Il fait une chaleur intense dès neuf heures du matin", se plaint-elle.
Le réchauffement climatique touche de plein fouet Vila da Barca, où vivent environ 7.000 personnes.
Cette favela est située non loin du centre-ville, juste à côté d'un quartier chic, et à quelques kilomètres du lieu où se déroule depuis lundi la conférence de l'ONU sur le climat, à Belem, capitale de l'Etat septentrional du Para.
Si la préservation de la forêt amazonienne toute proche est un sujet phare de la COP30, "personne ne parle de protéger ceux d'entre nous qui vivent dans l'Amazonie urbaine", dit à l'AFP Gerson Bruno, président de l'association des résidents de Vila da Barca.
"Personne ne discute de la façon dont la crise climatique affecte nos territoires les plus vulnérables", s'indigne ce jeune homme de 35 ans.
Bien que la plus grande forêt tropicale de la planète soit le symbole de l'Amazonie brésilienne, plus de 75% de ses 27 millions d'habitants vivent dans des zones urbaines, selon les données officielles.
A Belem, plus de la moitié de la population vit dans des favelas.
- Eau courante et égouts -
Dans ces quartiers densément peuplés et souvent dépourvus des infrastructures les plus basiques, l'impact de la crise climatique est accentué, notamment par les problèmes de traitement des eaux.
À Vila da Barca, malgré des "débuts problématiques", selon Gerson Bruno, les habitants ont pu obtenir la réalisation de travaux en ce sens à la faveur de la COP.
En majorité noirs et métis, les résidents ont d'abord protesté quand ils ont constaté qu'une station d'épuration serait construite à l'intérieur de leur favela, mais pour profiter uniquement au quartier cossu adjacent.
Cette mobilisation, qui a attiré l'attention des médias locaux après son écho sur les réseaux sociaux, a permis que les autorités débutent enfin des travaux d'installation du tout-à-l'égout à Vila da Barca, tout en améliorant la distribution d'eau courante.
Quelques mois avant la COP, des familles devaient encore acheter des bidons pour se laver.
- "Terre ferme" -
La température maximale de Belem a augmenté en moyenne de 1,96ºC de 1970 à 2023.
De quoi augmenter "la vulnérabilité aux vagues de chaleur et les problèmes de santé associés, ainsi que la pression sur les infrastructures", selon une récente étude scientifique du Centre universitaire de l'Etat du Para.
Belem est également l'une des métropoles les moins arborées du Brésil.
Un paradoxe criant alors qu'elle est cernée par l'énorme forêt amazonienne.
Le gouverneur du Para, Helder Barbalho, le reconnaît auprès de l'AFP: "L'Amazonie urbaine est un défi très important, il faut davantage d'investissements pour équilibrer les solutions pour la forêt et pour les villes."
Devant sa maison à Vila da Barca, sur une passerelle en bois branlante, Elizabeth Campos Serra, retraitée de 67 ans, sait ce qu'elle réclamerait au président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva si elle pouvait le rencontrer.
"Je dirais à Lula de nous sortir d'ici, j'aimerais vivre sur la terre ferme."
U.Dumont--JdB