

Comme Julien Song, ces influenceurs qui ont mis à la mode le jeu d'échecs
Longtemps considérés comme "un truc de geek", les échecs deviennent tendance grâce à des créateurs de contenu comme le Français Julien Song, qui ont su populariser le jeu ancestral via les réseaux sociaux.
"Je vais vous apprendre une technique ultra-importante pour bien jouer aux échecs avec les blancs": dans la pénombre du Blitz Society, un bar parisien dont il a fait son QG, le maître international de 32 ans filme sa dernière leçon, accoudé sur l'échiquier, à l'aide d'un téléphone sur un trépied.
Depuis qu'il a quitté son job de conseiller en stratégie il y a quatre ans après un burn-out, il a gagné plus de 1,5 million d'abonnés cumulés sur toutes les plateformes (Instagram, Tiktok, Youtube, Facebook...).
Rejoignant ainsi les grands noms des échecs sur les réseaux sociaux: l'Espagnol Rey Enigma, l'Américain GothamChess, le Français Blitzstream, la Suédoise Anna Cramling ou encore la Russo-israélienne Dina Belenkaya.
Car si la tendance de ce type de vidéos est récente en France, "dans le monde anglophone, il y en a plein", explique Julien. Dans cette discipline dominée par les hommes, "il y a d'ailleurs plus de femmes que d'hommes créateurs de contenu échecs connus sur le plan mondial".
"Mon but, c'est de le simplifier, de le rendre plus fun avec comme objectif de ramener de plus en plus de monde vers la pratique du jeu", explique-t-il à l'AFP. "Quand on pense échecs, je pense qu'on se dit direct: +c'est un truc de geek, un truc de nerd+".
Avec le succès de la série Netflix "Le Jeu de la Dame" (2020), les confinements du Covid-19 puis le succès des vidéos en ligne, la tendance s'est inversée.
- Duel avec Wembanyama -
En cinq ans, le nombre de licenciés en France est passé de 50.000 à 80.000.
Côté amateurs, le nombre de joueurs francophones a bondi de 143% en un an sur l'un des sites les plus populaires, Chess.com, atteignant 1,8 million de personnes. "Ce qui est fou, c'est qu'il y a des booms et ensuite, il n'y a pas de rechute", observe Julien Song, "les personnes qui se mettent aux échecs continuent à jouer".
Classé 2309 Elo –un classement relatif qui va de 400 pour un vrai débutant à au-delà de 2.000 pour les meilleurs- Julien Song a commencé à jouer à l'âge de 8 ans. Après plusieurs années de compétition, il obtient son titre de grand maître à 20 ans.
Mais c'est dans sa nouvelle vie sur les réseaux qu'il a signé ses plus gros coups.
Comme celui de coacher Inoxtag, un des youtubeurs les plus célèbres de France, qui a organisé plusieurs tournois diffusés en direct.
Et, en juillet, Julien Song a affronté la star française de la NBA Victor Wembanyama, passionné d'échecs, au cours d'un tournoi organisé par le joueur des San Antonio Spurs dans sa ville natale du Chesnay (Yvelines, près de Paris).
Pendant une séance de cardio, lorsqu'il est essoufflé, le basketteur géant "enchaîne parfois avec une position d'échecs où il faut trouver une solution", raconte Julien Song, "ça permet de travailler la prise de décisions sous fatigue".
Autres adeptes sportifs: les frères Alexis et Félix Lebrun (tennis de table) ou le pilote monégasque Charles Leclerc (F1).
Aujourd'hui, sa communauté s'étend aussi dans le monde réel. Comme ce jour-là, en plein cœur du mois d'août à la Blitz Society, où Yingjunxiong Zhang, 13 ans, venu de Barcelone, lui demande un autographe, avant de le défier sur l'échiquier.
"J'ai commencé à le suivre quand il avait environ 10.000 abonnés. Mais après qu'il a joué contre Rey Enigma, j'ai regardé davantage ses vidéos", raconte l'adolescent.
Cette popularité croissante, "c'est un peu une revanche personnelle". "Quand j'étais jeune, je ne disais pas trop haut que je jouais aux échecs", raconte le maître international.
Avec des règles simples, un accès facile, et un engouement intergénérationnel, "il n'y a pas de raisons de ne pas jouer", conclut Julien Song.
O.Meyer--JdB