Des salariés portent plainte contre Lactalis pour récupérer des primes minorées
Plus de 500 salariés et ex-salariés du groupe laitier Lactalis ont déposé plainte auprès du Parquet national financier (PNF), considérant être victimes d'une fraude fiscale de leur employeur, a annoncé mardi leur avocat Me Renaud Portejoie à l'AFP, dont l'action est contestée par la société.
Les salariés estiment que l'entreprise, qui a réglé 475 millions d'euros à l'administration fiscale pour "clore un différend" en décembre de l'année dernière, a minoré son bénéfice pendant plusieurs années et ainsi amputé les primes de participation versées à ses collaborateurs.
La prime de participation est en effet calculée en fonction des bénéfices de l'entreprise.
Chacun des quelque 16.000 salariés de droit français de Lactalis est potentiellement concerné, selon Me Portejoie, qui chiffre en "centaines de millions d'euros" le montant total non versé.
L'accord conclu avec le fisc fin 2024 "a permis de mettre un terme à un différend d’interprétation portant sur l’imposition de deux sociétés internationales, lesquelles ne sont en aucun cas concernées par le dispositif de participation aux résultats des salariés", a indiqué une porte-parole de Lactalis dans une déclaration transmise à l'AFP.
Demandant plus de transparence dans les informations financières publiées par l'ensemble du groupe, dont la maison mère BSA, les salariés s'estiment également victimes "d'escroquerie", selon M. Portejoie.
"Ils entendent, par la présente déposer plainte contre X" pour ce motif, précise le document envoyé au PNF et consulté par l'AFP.
- Enquête pour fraude fiscale -
La plainte auprès du PNF est une nouvelle étape pour les salariés et ex-salariés regroupés au sein de l'association, "Justice pour nos primes".
"Pendant des années, vos primes de participation ont manifestement été réduites de manière injuste", détaille son site internet.
L'association qui porte cette action "prétend trompeusement exercer une +action de groupe+ et ne dispose d'aucun intérêt à agir, ni d'aucun mandat", a argué Lactalis.
La société ajoute même qu'une "action ordinale et pénale contre ce type de pratique" est en cours.
Parallèlement au litige fiscal soldé en fin d'année dernière, le groupe Lactalis est visé depuis 2018 par une enquête du PNF pour blanchiment de fraude fiscale aggravée "portant sur des suspicions de minoration de son bénéfice imposable", avait appris l'AFP début 2024, de source judiciaire.
Ces investigations ont ensuite été étendues aux chefs de fraude fiscale aggravée. Le PNF a en effet reçu en 2019 un signalement du syndicat agricole Confédération paysanne puis, en 2022, des dénonciations fiscales obligatoires émanant de l'administration fiscale, selon cette source judiciaire.
Les sièges de plusieurs sociétés du géant mondial avaient été perquisitionnés début 2024, le siège du groupe à Laval (ouest de la France), ses bureaux à Paris et l'hôtel particulier de son dirigeant, Emmanuel Besnier, également situé dans la capitale, avait alors indiqué une source proche du dossier.
Ancienne fabrique familiale fondée en 1933 en Mayenne, Lactalis s'est transformée au gré d'acquisitions successives en empire international du lait, détenant des marques incontournables des supermarchés comme Président, Leerdammer ou Galbani.
Le groupe a dépassé pour la première fois en 2024 les 30 milliards d'euros de ventes.
R.Cornelis--JdB